Lettre à ma gynécologue

Alors voilà, j’ai un problème avec les gynécos elles me font peur, je trouve les examens désagréables et je n’aime pas me retrouver nue devant une inconnue quand bien même elle est là pour mon bien. J’ai lu il y a quelques temps cet article sur la nudité lors de ces consultations, je trouve les conclusions de ce bonhomme rassurantes mais partagées par trop peu de médecins. Bref, je n’arrive pas à me fidéliser à une gynéco, parce qu’il n’y en a jusque là aucune qui soit arrivé à me rassurer, du coup, mon angoisse grandi, cercle vicieux…

Mais j’ai des petits problèmes gynécos que j’arrive pas à régler. Je suppose que le fait que j’aille voir à chaque fois une personne différente et que je repousse à chaque fois les rendez vous au maximum n’aide pas, mais bon…

Bref,  j’ai aussi décidé de ne plus me laisser faire par les médecins qui me font chier avec mon poids. Alors j’ai décidé de répondre, si c’est possible sur le coup, là, c’était pas possible, alors je me suis fendue d’un petit courrier. Je ne pense pas que ce genre d’action soit efficace en soit, mais si on est plein à leur faire remarquer que c’est aussi à cause de leur manque de tact que les personnes grosses vont moins chez le médecin que les personnes normées, peut-être ils finiront par comprendre.

Il y en a marre de repartir honteuse, et triste, de ne pas pouvoir avoir confiance en son médecin, ne n’être perçue que comme un bout de gras, de les voir vouloir à tout prix réparer nos corps parfois aux dépends de notre état psychologique, de notre acceptation de nous même.

Donc j’ai écrit à cette personne cette douce missive :

Madame,

J’ai eu rendez vous avec vous le … . Je me permets de vous écrire pour vous signifier certaines choses que je n’ai pas eu le temps de dire pendant la consultation, ou que je n’arrivais pas à formuler sur le coup.

Je vous ai dit clairement que j’avais peur des consultations gynécologiques, d’autant plus que celle-ci s’annonçait douloureuse. Non seulement vous n’avez pas pris la peine de relever ma remarque, mais une fois nue, dans une position désagréable, lors d’un examen douloureux qui m’angoissait, vous me posez des questions sur mon poids, sujet qui n’est pas pour mettre à l’aise et évoquez les risques cardio-vasculaire, ce qui n’est pas pour rassurer. Rassurez vous, je connaît très bien ces risques tant on me les a répétés.

L’examen me fait souffrir, mais cela ne semble pas être votre priorité, vous me demandez alors si je mange entre les repas. Je réponds que non, pas particulièrement, mais vous me reposez la question deux fois et je fournis toujours la même réponse.

Vous m’avez ensuite prescrit une nouvelle pilule, sans me dire pourquoi je devais en changer, les seules questions que vous m’avez posée sont de savoir si j’avais des sécheresses vaginales et si ma pilule précédente me donnait faim. Par contre si je fume ou non ne semblait pas vous inquiéter.

Alors, que les choses soient claires une bonne fois pour toutes : je ne mange pas entre les repas, ou pas souvent, je ne mange pas plus, pas moins que quelqu’un d’autre et je ne mange ni mieux, ni moins bien qu’une personne qui ne recevrait aucune réflexion sur son poids de la part des médecins, de sa famille ou des passants dans la rue.

J’ai effectivement décidé d’arrêter les régimes désastreux et dangereux pour ma santé et de ne pas m’affamer pour rentrer dans les courbes de poids dites normales. Mais ce n’est pas pour autant que je fais n’importe quoi.

Toutes ces questions et surtout le manque de tact avec lequel elles ont été posées n’ont pas aidé à me rassurer vis à vis des examens gynécologiques, elles ont également pris beaucoup de temps sur la consultation. Si bien, que vous sembliez pressée d’en finir. Vous avez certes, répondu à mes questions, mais succinctement et tellement rapidement que je n’ai pas pu retenir le nom de l’infection que vous m’aviez diagnostiquée, ce qui serait pourtant utile pour mon suivi.  Je n’ai également pas compris à quoi servaient les médicaments que vous m’avez prescrits. J’avais par ailleurs prévu de vous poser d’autres questions sur ma contraception, mais je n’ai pas pu. J’estime que pour 53€ les 20 minutes dont 30€ de ma poche, ce n’est pas trop demandé que d’être rassurée, bien traitée et que l’on réponde à mes questions. D’autant plus vu les les délais pour obtenir un rendez vous et le prix des consultations.

Je tiens également à porter votre attention sur deux autres points :

– Vous m’avez fait un frottis sans m’avertir à l’avance que j’allais recevoir une facture pour ce prélèvement et devoir avancer les frais. Mes finances ne me le permettent pas vraiment. Si j’avais eu le choix, je serai allée en laboratoire et j’aurais pu bénéficier du tiers payant.

– Vous avez supposé d’emblée que j’avais un seul partenaire, que j’avais des rapports sexuels sans préservatif, et que ce partenaire était un homme. Vous avez diagnostiqué une MST, m’avez demander de traiter mon partenaire, mais vous ne m’avez pas indiqué si je dois prévenir d’éventuels autres partenaires, ni si cette infection peut se transmettre malgré l’usage d’un préservatif. J’ai de nombreuses amies lesbiennes qui ne sont pas suivies gynécologiquement parce que les médecins les supposent trop souvent hétérosexuelles et qu’ils n’ont aucune connaissance de leurs pratiques sexuelles.

Pour ma part, je ne consulterai plus votre cabinet, j’irais trainer mon angoise des gynécologues ailleurs. Je suivrais mon traitement, mais si mes problèmes persistent, je ne vous demanderais pas de rendez vous pour une échographie de contrôle et je n’effectuerai pas le suivi chez vous.

Si je vous écris aujourd’hui, c’est certes pour vous signifier mon mécontentement, mais aussi en espérant que cela vous servira ainsi qu’à vos futures patientes.

Cordialement,

.L.

8 réflexions sur “Lettre à ma gynécologue

  1. Ha ça me rappelle celle que j’avais vu pour une mycose et qui m’a soûlée pendant 30 mn sur mon poids… Depuis j’en ai trouvé une géniale sur Paris (si ça vous intéresse envoyez moi un mail 🙂 ), qui prend son temps, n’est pas grossophobe et prend… 24€ la consult!
    PS Est-ce que vous acceptez des intervenants extérieurs sur le blog?

    • Salut,
      c’est flatteur une réponse si rapide… Joie bonheur, liesse éternelle. Surtout que je ne fais pas trop de pub sur ce blog, je suis novice en la matière et pas trop connectée du réseau social.
      Bien sûr, si tu veux nous faire parvenir des textes tu peux nous les filer, c’est avec plaisir qu’on les lira et s’ils sont dans la ligne du blog qu’on les publiera.
      La ligne du blog c’est pas un truc de ouf malade, c’est juste qu’on est féministes, dans une optique libératrice et d’abolition des normes de beautés, de mode de vie. On est aussi contre toute forme de domination.
      Mais les contributeur-ices sont les bienvenu-es. Tu peux nous écrire à : les.grosses.feministes@gmail.com ou si tu veux je te donnerai mon mail perso, ça ira plus vite.
      A très vite.

      .L.

  2. Je ne suis pas très familière des discriminations liées au poids, même si je pense que ça s’arrange petit à petit au fil de mes discussions avec des personnes grosses. En tout cas j’entends souvent parler du calvaire de la visite médicale (et plus spécifiquement gynécologique).
    J’en profite pour te remercier de penser aux lesbiennes/bis pour qui aller chez le gynéco n’est pas toujours évident (c’est mon cas). C’est terrifiant de voir que certains praticiens n’ont AUCUNE connaissance sur la sexualité entre femmes et parfois te sortent des choses ahurissantes (« les IST ne concernent que les femmes hétéros », etc.).
    Il n’y a pas un seul rapport au corps, il n’y a pas une seule orientation sexuelle, il n’y a pas une seule sexualité possible. Il serait temps que certain(e)s sortent de leur vision normée de la société ! Car en attendant, ils ne sont pas aptes à s’occuper de certaines patientes…

  3. Mais enfin pourquoi ne découvre-je ce blog qu’aujourd’hui ?
    Je croyais que le « fat feminism » n’avait pas trop de prise en France… Et je me sens tout d’un coup libérée.
    Cet article arrive au bon moment : un jour où je me suis pesée pour me préparer psychologiquement à 2 rendez-vous médicaux qui vont vite arriver et pour lequel j’ai très peur.
    J’en ai tellement marre d’avoir peur d’aller chez le médecin, non pas pour la peur d’un éventuel problème de santé, mais pour la peur de ce sempiternel discours moralisateur…
    La dernière fois que je suis allée chez la gynéco, c’était une nouvelle que « j’essayais », elle m’a sorti le mythique « et vous avez déjà essayé de faire un régime ? » NON NON, tiens, mais quelle bonne idée ! Je me trimbale du surpoids depuis que je suis petite, mais personne ne m’a jamais donné cette brillante idée !
    Bon, j’écris un pavé, je suis désolée, mais vraiment, je suis heureuse de lire un article décrivant si bien le sentiment que j’éprouve face au corps médical. Merci, donc.

  4. Ah tiens … cet article fait écho à une très mauvaise expérience avec 1gynéco. J’ai voulu lui écrire & mon copain m’a dissuadé, m’affirmant qu’il s’en ficherait, que ça servait à rien…
    Je n’aurais pas du l’écouter parce que j’ai tellement pleuré que mettre à plat les choses comme toi, rien que ça fait du bien !

  5. J’ai moi aussi peur d’aller chez un/une gynéco, je n’aime pas l’idée d’être exposée ainsi devant une personne que je ne connais pas, et mon expérience des médecins (j’ai eu un problème assez grave pendant mon enfance) ne m’aide pas, mais alors pas du tout à oser franchir la porte d’une personne de la profession.
    Je trouve l’idée de la lettre bonne, et espère naïvement que, si celles d’entre nous qui vivons de mauvaises expériences le faisaient aussi, peut-être certains médecins changeraient leurs façons de voir les choses, de nous voir, et d’appréhender nos peur.

  6. C’est courageux d’avoir écrit cette lettre ! On est nombreuse à avoir eu des expériences négatives …

    A cause d’un changement de pilule, j’ai eu une énorme poussée de boutons et la gynéco a osé me sortir que 1. ça ne pouvait pas être la faute de la pilule, celle que j’avais avant « cachait » mes boutons – c’est vrai que non, des hormones dans le corps, ça peut pas donner de boutons hein … en plus je n’en avais pratiquement pas eu étant ado 2. c’était parce que je mangeais mal, comme tous les étudiants quoi .. pas assez diversifié etc – or ce n’est pas vrai. J’en ai pris plein la tronche et ça m’avait bien soulé.

    Et ce n’est qu’un exemple… J’en ai trouvé un sympa qui me parle normalement, pas comme si j’étais une demeurée, ça change !

    Grâce au site de ce médecin http://martinwinckler.com/ j’ai compris que beaucoup nous obligeaient à des examens inutiles et douloureux (un frottis tous les ans ça sert à rien) et qu’ils créaient une sorte de dépendance notamment en nous obligeant à revenir pour le frottis et la pilule qui pourrait être prescrite par un généraliste.

    Bref, désolé pour le pavé ! Sans connaître les mêmes remarques je me sens concernée 🙂

  7. Une solution alternative c’est d’aller chez une sage femme de consultation qui est formée au suivi gynéco. Leur créneau de consult est plus long que celui des gynécos, il y a le temps d’instaurer un vrai dialogue, de répondre aux questions, elles sont souvent plus sensibles aux histoires et émotions de leur patiente, et en plus c’est moins cher (autour de 20euros) tout bénèf !

Laisser un commentaire