Fat People and TV shows #1 : Super Fun Night

Depuis un moment, j’envisage de faire un sujet sur les séries télé, ma grande passion dans la vie. Je voulais aborder le traitement des gros-ses dans les séries. Evidemment en France, à moins que j’ai raté un truc, la question n’est pas abordée, ou alors les gros sont vieux ou des personnages secondaires. Après, je ne regarde pas de séries françaises, j’avoue. Le but, était donc de voir au travers des différentes séries que j’ai pu regarder quel message est véhiculé à travers la représentation des personnages gros. En plus, on a vu sortir récemment quelques séries (pas ou peu diffusées en France) spécifiques à la question de la grosseur (Huge, Mike and Molly…) ou alors avec des personnages secondaires récurrents et charismatiques (Glee) voire des personnages principaux gros (Drop Dead Diva, My Mad Fat Diary). Super Fun Night  est le sujet du jour, une série prometteuse créée par la fantastique Rebel Wilson, celle la même qui affirme qu’elle porte des chaussures en forme de lapin pour détourner l’attention de son double menton. Elle a également fait un pacte de non régime avec Melissa Mc Carty. Et surtout, surtout, Rebel c’est son vrai nom, ses frères et sœurs s’appellent : Liberty, Ryot et Annachi, rien que ça.  Récemment, on l’a vue dans Hit Girls, teen movie musical dans la vibe de Glee, dont on retrouve par ailleurs un des personnages dans la série.

Donc, cette série. Format sitcom, 23 minutes, 17 épisodes, sans rires enregistrés, dieu soit loué. Le pitch : Kimmie (Rebel Wilson) habite avec ses deux copines, elles ont une vie de post adolescentes, poursuivies par leur image de lycéennes looseuses et célibataires, perpétuellement mal à l’aise socialement. Tous les vendredis soirs, elles passent la soirée ensemble, leur slogan est clair : »always inside, always together ». Mais, un soir, elles décident de sortir, la soirée qui aurait pu être un cataclysme s’achève par un bilan pas aussi catastrophique que prévu. Elles décident de recommencer à sortir  et de rebaptiser les soirées « super fun night ». Les voilà embarquées dans de nouvelles aventures. En parallèle, on suit Kimmie au boulot, elle est avocate et vient d’avoir une promotion. Elle est évidemment amoureuse d’un de ses collègues beau gosse, Richard, et est mise en concurrence avec une bombasse filiforme, dans un premier temps sur le plan professionnel puis sur le plan affectif puisque celle-ci devient vite la petite amie de Richard.

Le trailer était alléchant. Je m’attendais donc à une comédie sympathique dans la ligne de The Big Bang Theory, mais avec des filles et en moins geek. En plus, j’adore les séries qui parlent de gens au boulot, les séries d’avocats, les séries hospitalières, les flics moins, mais le côté professionnel me dérange pas, même si parfois il inscrit un peu trop les séries dans un genre défini et hermétique. Les séries d’avocat ressemblent vite les unes aux autres, par exemple.

Pleine d’indulgence pour Rebel Wilson, je me suis donc tapé les 17 épisodes en quelques jours, histoire de rester dans l’ambiance. Même si le traitement de la grosseur peut paraitre intéressant, il manque sa cible. L’héroïne est grosse, le sujet n’est pas passé à la trappe mais n’est pas capital non plus, elle n’est pas définie que par ça, point positif. Le sujet est traité de façon complexe comme étant connecté à ses autres difficultés sociales, mais pas la cause de tout. On voit l’impact que cela peut avoir sur sa vie personnelle et professionnelle, cela reste contre balancé par d’autres aspects de sa personnalité. Et c’est là que le bât blesse, les autres aspects de sa personnalités, qui sont censés constituer la complexité du personnage, ne sont que des clichés liés à la grosseur et pas les plus valorisants. Elle manque sérieusement de limite et de pudeur, elle parle à tort et à travers. Elle est toujours le centre du gag, mais pas parce qu’elle est drôle et piquante. Elle est puérile et passe son temps à blaguer grassement sur tout, elle est dissipée et manque de confiance en elle. Elle se retrouve perpétuellement coincée dans des situations gênantes et humiliantes qu’elle a provoquées par maladresse. Elle est trop gentille et généreuse et passe sont temps à se faire avoir, elle est docile et impressionnable. Elle reste sympa avec les gens qui l’humilient, elle est prête à tout pour un peu d’acceptation. Même quand elle essaye de se contrôler et d’être prise au sérieux, elle échoue.  Bref, le cliché de la grosse complétement insécure et inadaptée, sans volonté et sans contrôle sur elle-même. C’est pour ça que j’ai été consternée quand j’ai vu que Rebel Wilson avait elle-même créé la série. Même si les blagues sur les gros-ses n’ont pas le même portée quand elles sont faites par des gros-ses, ici, on n’échappe pas au bon vieux stéréotype.

Les personnages sont plutôt caricaturaux, ce qui n’est pas forcément une mauvaise chose dans une comédie, mais la caricature nécessite une certaine subtilité qui manque à la série. Kimmie est présentée comme la bonne vivante avec qui on ne s’ennuie pas (avec qui le personnage de Richard ne s’ennuie pas) contrairement à Kendall qui est mince, obsédée par son apparence et ne laisse rien dépasser, qui est froide, arriviste et impitoyable. Kimmie est la future mère des enfants de Richard, celle qui laisse de la place dans sa vie pour autre chose que son ambition professionnelle, celle qui rassure, celle qui le fera se sentir beau et valorisé, celle qu’il ne retrouvera jamais au lit avec son patron ou son meilleur ami,  mais dont il aura toujours un peu honte. Elle, elle sera éternellement reconnaissante et se si sentira privilégiée d’avoir joué hors de sa League (oui, les métaphores sportives ça marche aussi pour les filles, et non, ça ne les rend pas moins ennuyeuses) qu’elle ne râlera jamais quand il sera gêné de la présenter à ses futurs associés.

Plutôt que de creuser le filon de l’histoire de cette fille, il a fallu rajouter une bonne vieille romance avec le boy next door du cabinet d’avocat, déjà vu dans Ally Mc Beal et Drop Dead Diva (notons que sûrement grâce à l’âge de Katy Bates, Harry’s Law, série dont je vous recommande vivement la première saison, nous avait permis d’éviter de tomber dans l’écueil). On patauge dans sa vie sentimentale marécagueuse qui bouffe tout le reste en se retrouvant encore une fois avec l’éternelle intrigue du cul entre deux chaises. On dirait Carrie de Sex and the City en plein dilemme entre Big et le menuisier chouchou. Je me rappelle m’être dit à un moment « merci, ils nous évitent cette situation non seulement éculée mais aussi improbable ». Mais non, on y va, et franchement. Le but était de mettre à l’écran un personnage plus vrai que nature, trash et un peu crado, et on lui colle une vie amoureuse hautement fantaisiste? Le décalage est trop grand, on n’y croit pas. Pour le coup, les aventures sentimentales de ses colocs sont beaucoup plus intéressantes.

Ce personnage pour le moins atypique, quoiqu’on en pense, n’est pas exploité à fond. Elle est noyée par trois nouveaux personnages (trois gars, les voisins du dessous de la coloc des filles, eux aussi un peu nerd) dont on ne sait pas trop quoi faire. En plus, la série manque sérieusement de rythme.  Les gags s’éternisent, rebondissent sur eux mêmes jusqu’à l’écœurement.

Pour un format court, ça traîne en longueur. La faute au scénario ou à ABC ? Là est la question. La série était prévue sur CBS. Mais c’est finalement ABC qui la diffusera  et apporte un certain nombre de modifications. La série dont le pilote à été tourné à plusieurs caméras finira filmée par une seule.  ABC, chaîne réputée puritaine, aux séries très policées, est sûrement aussi à l’origine de quelques modifications scénaristiques. A-t-elle gardé les grosses blagues qui tachent aux dépends de toute subtilité? C’est possible. La série, qui ne remettra surement pas le couvert pour une seconde saison, semble sacrifiée par la chaîne, diffusée dans un créneau réputé être un cimetière à séries, au milieu de rediffusions, c’était déjà mal parti. Le rythme est brisé, le pilote, dont la bande annonce est issue, n’est pas diffusé, on arrive donc catapultés au milieu de personnages mal présentés et qui resteront mal définis. Ce pilote sera finalement le huitième épisode de la série, déstabilisant la trame narrative, un flashback dès la première saison, c’est risqué.

En somme, c’est raté, je suis plutôt déçue, je n’aurais pas ma comédie fat positive qui me fout la patate, en tout cas pas cette année. Ce que je retiendrais de la série, c’est évidement Rebel Wilson, dont j’attends résolument qu’elle sorte du registre fat-potache, mais en qui, comme Lara, je crois encore, mais surtout les quelques instants jubilatoires que sont les passages musicaux. Notamment, le générique reprise de la chanson qui fait du bien de Queen Don’t stop me now (ce qui devait être le titre original de la série). Enfin des moments valorisants, drôles et vraiment décalés pour cette fat chick. Comme ce morceau, une réussite :